Explosion de l'usine AZF : accident industriel de Toulouse

Explosion de l'usine AZF : accident industriel de Toulouse L'explosion de l'usine AZF a eu lieu le 21 septembre 2001 à Toulouse. Retour sur cet accident industriel qui a entraîné la mort de 31 personnes, dont 21 employés du site.

Résumé de l'explosion de l'usine AZF - Le 21 septembre 2001, les Toulousains ont vécu l'une des pires catastrophes de leur ville : l'explosion de l'usine AZF. Classée Seveso, cet établissement appartenait à Grande Paroisse, une filiale d'Atofina (groupe Total). Son activité principale était la synthèse d'ammoniac. A 10h17, une déflagration est ressentie ou entendue à plus de 75 km de Toulouse et un séisme est enregistré par les spécialistes. Après des mois d'enquête, c'est une erreur de manipulation qui est retenue comme cause de l'accident industriel. Le procès démarré en 2009, s'est achevé en 2017. Le directeur du complexe chimique et la société Grande Paroisse ont été reconnus coupables de négligence. En plus des blessures (explosion des tympans, fractures ouvertes, acouphènes…), la population locale a souffert de traumatismes psychologiques. En 2014, l'Oncopole de Toulouse, un centre international de recherche sur le cancer, a ouvert ses portes sur l'ancien site de l'usine AZF.

Où se situait l'usine AZF de Toulouse ?

Ouverte en 1927, l'usine AZF appartenait à Grande Paroisse, une filiale d'Atofina. Son opérateur était TotalFinaElf, aujourd'hui TotalEnergies. Elle se situait au sud de la ville de Toulouse (Haute-Garonne). Le site s'étendait sur plus de 70 hectares. Il était entouré par la Garonne et la Société nationale des poudres et explosifs à l'est, ainsi que la route D120 à l'ouest. AZF signifie "Azote Fertilisants". L'usine AZF était une usine spécialisée dans l'agrochimie. Elle était classée Seveso, une directive qui identifie les sites industriels présentant des risques d'accident majeurs. Un niveau élevé de prévention est donc indispensable au sein de ces installations. Certifiée ISO 14001 et 9002, cette usine réalisait notamment de la synthèse d'ammoniac, d'urée et de nitrates à partir de gaz naturels et d'engrais azotés.

Pourquoi l'usine AZF a-t-elle explosé en 2001 ?

D'après l'enquête sur l'accident industriel, c'est un contact entre le nitrate d'ammonium et le chlore qui a provoqué la déflagration dans l'usine. Un stock de 400 tonnes de nitrates d'ammonium (NH4NO3), en contact avec 500 kg de produits chlorés, a explosé et ravagé l'usine. Ces nitrates d'ammonium étaient destinés à produire de l'engrais.

Comment s'est déroulée l'explosion de l'usine AZF ?

Le 21 septembre 2001, 266 salariés et 100 agents d'entreprises sous-traitantes sont présents sur les lieux. A 10h17, le stock de 400 tonnes de nitrates d'ammonium explose dans le hangar 221. Le bâtiment était situé au nord de l'usine et était dédié au stockage de ce composé. La détonation a été entendue à plus de 75 km de la ville de Toulouse. Dans le même temps, un séisme d'une magnitude de 3,4 sur l'échelle de Richter a été enregistré. Un cratère de 40 m de diamètre et de 5 à 6 m de profondeur s'est formé sur le lieu de l'explosion.

De nombreux témoins, présents aux alentours, disent avoir remarqué des phénomènes variés (lumineux, sonores…) juste avant la déflagration. Deux détonations se seraient produites, séparées de quelques secondes. Les témoins rapportent que la première explosion a été moins forte. Un doute persiste cependant : une seule déflagration pourrait en réalité avoir eu lieu et la seconde aurait été causée par un phénomène d'écho.

Usine AZF : les images et vidéos après l'explosion

"J'entends un premier 'boum' très sourd, puis un deuxième bruit quelques secondes après. Un souffle arrache tout, les fenêtres s'ouvrent, les vitres sautent et la poignée en fer traverse le bureau. Au téléphone, je dis à mon interlocuteur que je suis désolé, qu'il vient de se passer quelque chose de dramatique." Au moment de l'explosion, Philippe Douste-Blazy est l'Hôtel de Ville. Alors maire (UMP) de Toulouse, il raconte à France Info être parti sur la rocade avec son chauffeur pour voir la catastrophe, avant d'arriver à AZF. Le président Jacques Chirac le rejoindra quelques heures plus tard pour voir la "zone de guerre, où l'on ne reconnaissait même plus l'usine" comme le décrit René Maillot, directeur adjoint de l'usine au moment des faits, dans un documentaire sur National Geographic. Il s'agit de la plus grande catastrophe industrielle française depuis 1945.

Combien de morts a entraîné la catastrophe de l'usine AZF ?

31 personnes ont péri dans l'explosion de l'usine AZF, parmi elles :

  • 21 employés présents sur le site d'AZF : parmi eux, 10 travaillaient au sein de Grande Paroisse ;
  • 1 salarié de la Société nationale des poudres et explosifs ;
  • 9 personnes extérieures à l'usine, dont 2 issues du milieu hospitalier et 1 adolescent qui étudiait au lycée Galliéni, situé à 500 m de l'épicentre. Le jeune homme a été tué dans l'effondrement d'une structure en béton.

Plus de 2 500 personnes ont été blessées dans la catastrophe de l'usine AZF. Parmi les blessures, on recense des éclatements de tympans et de plèvre, des contusions d'organes comme la rate et le foie, des fractures ouvertes, des troubles auditifs, des acouphènes, etc. Des milliers de victimes de traumatismes psychologiques ont également souffert de l'explosion.

L'explosion de l'usine AZF est-elle due à un accident ?

De nombreuses hypothèses sont avancées : attentat, acte de malveillance, missile… Il faut rappeler que l'explosion a eu lieu 10 jours après les attentats du World Trade Center. D'autres causes, externes et non intentionnelles, sont évoquées, notamment une activité bactérienne en sous-sol. Enfin, un incident de process aurait pu avoir lieu : problème électrique interne à l'usine, pièce projetée à grande vitesse, etc.

A peine trois jours après le drame, Michel Bréard (alors procureur de la République) privilégie la piste de l'accident "à plus de 90 %". Une enquête judiciaire a été menée, de même qu'une enquête administrative (demandée par le ministre de l'Aménagement du territoire et de l'Environnement) et une enquête interne chez Atofina. Enfin, une enquête du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail a été réalisée.

Quelles sont les conclusions de l'enquête ? Le rapport final retient la thèse de l'accident chimique : un "mélange malencontreux" de 500 kg de produits chlorés a été déversé sur un tas de nitrates d'ammonium, une vingtaine de minutes avant l'explosion. C'est donc une erreur de manipulation qui serait à l'origine de la catastrophe. De plus, les conditions de stockage dans le bâtiment 221 ne respectaient pas les normes en vigueur, d'après un ancien employé.

Comment s'est déroulé le procès de l'explosion de l'usine AZF ?

procès AZF
Serge Biechlin, ancien directeur de l'usine AZF et ses avocats à la cour d'appel installée salle Jean Mermoz. © LANCELOT FREDERIC/SIPA (publiée le 31/05/2023)

Le procès s'ouvre le 23 février 2009 pour une durée de 4 mois. C'est la première fois qu'un procès en correctionnelle est filmé en France : les images seront rendues publiques en 2059 (50 ans après la fin du procès). Le 19 novembre 2009, c'est une relaxe générale qui est prononcée à l'encontre de tous les prévenus : le juge considère qu'il n'y a pas lieu à condamnation et que les charges ne sont pas suffisantes.

Le 12 septembre 2012, à la suite du procès en appel, c'est Grande Paroisse qui est condamnée pour homicides involontaires. Les peines sont les suivantes : 225 000 € d'amende pour la société, 3 ans de prison pour Serge Biechlin (le directeur du complexe chimique) dont 2 avec sursis et 45 000 € d'amende pour ce dernier.

Après un pourvoi en cassation, la cour annule les décisions de 2012 et renvoie l'affaire à la Cour d'appel de Paris. Finalement, Serge Biechlin est condamné à 15 mois de prison avec sursis et Grande Paroisse à 225 000 € d'amende pour négligence et fautes caractérisées.

Quelles sont les conséquences de l'explosion de l'usine AZF ?

commémoration
Commémoration devant le monument dédié aux victimes de l'explosion industrielle de l'usine chimique AZF à Toulouse. © FRED SCHEIBER/SIPA (publiée le 31/05/2023)

Les conséquences sont d'abord législatives : la loi Bachelot du 30 juillet 2003 est créée. Relative à la "prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages", elle a aussi pour but de mieux encadrer l'urbanisation future. C'est un texte qui se veut global, qui alerte sur les dangers environnementaux et qui accélère le processus d'indemnisation des risques naturels.

Alors que certains salariés souhaitaient redémarrer les machines épargnées, c'est l'entièreté du site d'AZF qui a été rasé, puis dépollué. Le campus de cancérologie de Toulouse (projet proposé par Philippe Douste-Blazy, maire de l'époque) a été érigé sur la zone et a accueilli ses premiers patients en 2014.

Autre symbole du traumatisme vécu par les Toulousains : les plaques d'immatriculation des véhicules du département sont passées directement de "AZE" à "AFG". La combinaison "AFZ" n'a pas été retenue.

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