Concordat de Bologne : le pouvoir des rois de France sur l'Eglise

Concordat de Bologne : le pouvoir des rois de France sur l'Eglise Le concordat de Bologne (1516) entre le pape Léon X et le roi François Ier, acte les liens entre l'Eglise catholique et la monarchie française. C'est la fin de la Pragmatique Sanction.

En France, dans un contexte organisationnel flou entre l'Etat et l'Eglise, le concordat de Bologne (1516) s'impose pour officialiser le pouvoir du roi. François Ier et le pape Léon X trouvent un accord à Bologne pour rétablir l'équilibre entre la monarchie et l'Eglise catholique, équilibre rompu par Charles VII avec la Pragmatique Sanction. Par une ordonnance royale, Charles VII avait limité le pouvoir du pape sur l'Église en réaffirmant l'autorité royale sur les nominations ecclésiastiques et en restreignant les revenus envoyés au Saint-Siège. Après Bologne, il est décidé que le souverain pontife ne gère plus les élections d'évêques, c'est au roi de nommer les remplaçants aux postes vacants dans les six mois. Ces nouveaux évêques prêtent serment au roi. Le pape peut quant à lui disposer à nouveau d'une taxe appelée "annate" versée par un nouveau titulaire, qui correspond à la première année des revenus d'un bénéfice. Malgré de nombreuses remises en question, ce concordat va perdurer jusqu'à la Révolution française de 1789.

Qu'est-ce qu'un concordat ?

Dans le domaine politico-religieux, un concordat ("accord" ou "traité" en latin) est un traité conclu entre le Saint-Siège et un Etat particulier. Cet accord, qui clarifie les relations entre l'Eglise catholique et les autorités civiles, est décidé bien souvent lors d'un concile. C'est sous cette assemblée d'évêques, convoqués par le pape, que sont débattues les grandes questions de doctrine ou de discipline. Les décisions prises sont actées à travers une bulle pontificale (document authentifié marqué d'un sceau).

Dans quel contexte le concordat de Bologne a-t-il été mis en place ?

Avant ce concordat, un grand pouvoir de décision manque au souverain François Ier concernant l'Eglise et les biens qui y sont liés. Le pape, de son côté, souffre d'un défaut d'autorité, et ses choix sont, la plupart du temps, grandement contestés. Le roi, qui savoure le premier succès de son règne, la victoire de Marignan, rencontre le pape Léon X en décembre 1515 à Bologne. Les discussions s'engagent alors sur ce qui deviendra le concordat. Ce dernier est signé à Rome le 18 août 1516 lors du concile du Latran.

Qu'instaure le concordat de Bologne ?

La promulgation du concordat de Bologne permet d'abroger la Pragmatique Sanction de Bourges, une ordonnance du roi Charles VII publiée en juillet 1438. Cet acte avait pour effet de soustraire au pape les responsabilités relevant de la direction des diocèses et des abbayes, il lui restait de ce fait uniquement ce qui concerne la foi. L'objectif premier était de limiter les abus de la papauté. Il n'avait plus le pouvoir de désigner les évêques et les abbés, alors élus par les chanoines et abbés en place. Malgré cela, la corruption et les menaces étaient souvent de mise lors des élections. Le concordat officialise donc la suprématie du pape sur les conciles nationaux, sans délaisser le roi, qui retrouve le pouvoir de nommer directement les sièges ecclésiastiques du pays. Des critères de recrutement sont établis, mais les "meilleures places" sont parfois attribuées en récompenses à des membres de familles nobles. La papauté bénéficie à nouveau d'un droit de versement des annates (taxe versée par le nouveau titulaire d'un poste ecclésiastique la première année de sa charge) lors de nouvelles nominations.

Quelles sont les conséquences de la mise en place de ce concordat ?

Léon X
Portrait de Léon X © SIPA (publiée le 29/08/2023)

Le contrôle des nominations par le roi, déjà exercé sous la pression, est désormais officialisé. Lors de la signature du concordat, ce droit royal de désignation n'inclut pas les territoires de la Bretagne et de la Provence. Une dérogation, un "indult" du 3 octobre 1516, corrige alors cet élément et permet d'étendre à ces deux territoires réunis les effets du traité. Ce pouvoir royal inédit est régi par des règles strictes pour les candidats (âge, éducation et pratique de la foi). Toutefois, ce principe gallican n'en sera pas moins à l'origine de désaccords, suite à des exceptions faites au seul bénéfice du roi. On pouvait en effet constater la nomination de nobles laïcs, parfois même athées, à des postes d'abbés ou d'évêques, seulement attirés par les revenus importants de ces hautes fonctions. La présence de ces commendataires laïcs va donner naissance à une opposition entre un haut clergé et un bas clergé, plus pauvre. Cette pratique est appelée régime de la commende.

Jusqu'à quelle date le concordat de Bologne est-il en vigueur ?

L'accord de Bologne reste en vigueur jusqu'à sa remise en cause lors de la Révolution française. Officiellement abrogé le 12 juillet 1790, il cède sa place à la Constitution civile du clergé à laquelle les curés et les évêques sont tenus de prêter serment. Ils assurent respecter les termes suivants : "veiller avec soin sur les fidèles du diocèse, être fidèle à la Nation, à la Loi et au Roi, maintenir de tout leur pouvoir la Constitution décrétée par l'Assemblée nationale et acceptée par le Roi". Le modèle démocratique appliqué à l'Eglise provoque l'indignation de Rome, et le pape Pie VI condamne cette Constitution. Un nouveau concordat voit le jour en août 1801 entre Napoléon Bonaparte et Pie VII, à travers lequel la France place le catholicisme comme religion principale du peuple. De son côté, le pape reconnaît la République et une organisation plus libre de l'Eglise. Sous la Restauration, Louis XVIII tente de rétablir le concordat de Bologne avec les ultraroyalistes, sans succès. Aujourd'hui, c'est la loi de séparation de l'Eglise et de l'Etat qui prime, sauf en Alsace-Moselle où le concordat de 1801 est toujours en vigueur pour des raisons historiques.

Autour du même sujet

Temps modernes